• ● Principe de précaution et impostures

    Une contribution d'Hervé Lainé qui m'a autorisé à le citer, et que je remercie. Elle est datée du Vendredi 11 janvier 2013, donc avant la manifestation.

    Qu’il soit d’abord bien clair que le mariage homosexuel m'importe (presque) aussi peu que … celui des prêtres. C’est dire que je ne suis ni pour, ni contre !

    Les couples homosexuels existent, et c’est tant mieux que cela puisse être. Qu’ils vivent en union libre, en concubinage, sous le régime du PACS ou celui du mariage – comme pour les couples hétérosexuels, vraiment et vulgairement je m’en fous. Et si ça peut régler quelques questions d’ordre fiscal et administratif, très bien.

    Je n’avais donc aucune envie de me joindre à une quelconque « foule des rues » … mais depuis quelques jours cette envie me chatouille de surmonter ma paresse naturelle et de rejoindre, ce dimanche à venir, la foule annoncée.

    Pourquoi ? Parce de plus en plus j’ai le sentiment d’être sous la pression d’une double imposture et du coup d’être pris en otage, bien au delà de la question du « mariage gay ».

    De quoi parle-t-on en effet ? Curieux par exemple que « Le Monde de ce jour daté de demain » (donc du 12/1/13) parle en première page de « mariage gay » et, en pages intérieures de « mariage pour tous » … terme apparemment plus « politiquement correct ».

    Première imposture : de quoi ce mariage est-il donc le nom ? Pas du mariage pour tous, pourrions-nous penser ... encore que : il n’est pas (encore) question par exemple, et c’est tant mieux, que j’épouse en justes noces ma fille ou (ce qui serait tout de même plus tendance) mon fils ; il n’est pas question non plus que j’épouse deux (ou plusieurs) "personnes du sexe" (peu importe lequel) – même si tout le monde est « consentant » (mais nous savons tous que cette revendication existe en de nombreux lieux, alors pourquoi pas ? …). Et pourquoi donc ne pas imaginer, dans un esprit d’égalité, une sorte de mariage collectif, où chacun dans un groupe se donnerait pour époux ou épouse à chacun des autres, sans distinction d’ailleurs d’orientation sexuelle ? Riez ! mais c’est exactement ce qui se passe dans certaines sectes qui n’hésitent pas, déjà, à revendiquer leur légitimation. Si nous parlons de mariage pour tous, il faut savoir jusqu’où – de proche en proche - peut s’en étendre l’impact sociétal. Jusqu’où sera-t-il jugé acceptable ?

    Deuxième imposture : mariage ou famille ? C’est évidemment la question majeure. Même si la question de la PMA (Procréation Médicalement Assistée) a été évacuée du projet de loi - mais pas celle de l’adoption, point cependant pas bien clair - on nous laisse ouvertement entendre qu’on y reviendra bientôt, très bientôt même, dans une future « loi sur la famille ». Comme quoi une chose pourrait en amener une autre ... un train peut bien en cacher un autre ! Il est évident qu’une pression insistante, déjà bien présente, agira, avec une bonne chance de réussite, pour faire légitimer au nom de l’égalité non seulement l’adoption par des couples « homoparentaux » (dans ce cas, on utilise volontiers ce néologisme plutôt que « homosexuel » ; imposture secondaire ... mineure certes, mais non anodine) mais aussi pour faire légitimer la PMA pour les couples de femmes. Et les couples d’hommes alors ? Par simple souci d’ « égalité », ici encore, il faudra bien trouver une solution … le recours à la mère porteuse « pour compte d’autrui » s’impose à l’évidence et ne pose aucun problème technique. Allons-y donc ! … Il faut être clair : ça existe déjà ; la question n’est pas là, elle est de savoir s’il est « sociétalement » (et culturellement) acceptable de légitimer ce type de situations, donc de le voir se développer.

    Allons un peu plus loin, mais pas si loin que ça : techniquement, on sait déjà comment « produire » des clones humains ; un peu plus loin encore : les progrès rapides de la biologie de synthèse laissent entrevoir la possibilité de construire des cellules, puis des êtres vivants, par des procédés partiellement ou totalement artificiels. Profitons-en : par souci d’égalité encore, pourquoi ne mettrions-nous pas ces possibilités techniques en œuvre en leur conférant une légitimité sociétale ?

    Ne risque-t-on pas un jour d’aller jusqu’à pouvoir commander en usine un enfant, ayant tel sexe, telle couleur, telles dimensions, tel âge à la livraison … ? On ne parle évidemment plus de naissance.

    Ainsi, de proche en proche, d’égalité en égalité, jusqu’où sommes-nous prêts à aller en matière de famille ? Jusqu’où peut s’étendre l’impact sociétal ? Jusqu’où sera-t-il jugé acceptable ?

    J’ignore si ces perspectives, à peine fictionnelles, à propos du mariage ou de la famille sont effrayantes ou finalement, à y bien penser, banales. Mais ce qui me surprend c’est qu’à leur propos, sous couvert d’une question, le mariage gay, objectivement de peu d’impact direct, on engage à la va-vite de possibles processus en chaîne avec un impact potentiellement colossal en termes de société. Impact dont la nature, comme l’importance de ses effets sont en réalité incertains ou inconnus.

    Dans d’autres domaines – ceux des sciences et du développement durable – une telle situation provoque immédiatement le recours à l’incontournable « principe de précaution ». Je pense aux OGM, aux nanotechnologies, au nucléaire, tous sujets qui font, avant toute décision lourde, l’objet de larges – et parfois interminables – débats associant toutes les parties prenantes : scientifiques et experts, professionnels, économistes, sociologues, politiques, citoyens …

    Pourquoi ne pas faire de même ? L’incertitude, avec tel OGM, de voir ou non se répandre tel ou tel gène indésirable serait-elle plus inquiétante que celle, avec telle conception de la famille, de voir ou non apparaître telle ou telle forme de procréation à la demande ?

    Pourquoi, lorsqu’on parle d’OGM, reconnaît-on que sont en effet soulevées des questions de société qui méritent débat et réflexion et pourquoi, pour le sujet qui nous occupe, alors que là aussi chacun reconnaît que des choix de société sont en cause, "le politique" entend-il décider pratiquement seul et dans l’urgence ... et qui plus est en ayant recours à l’ironie ou à la culpabilisation à propos de toute velléité de débat ? Peut-on accepter que, si l'on s'interroge sur le mariage pour tous ou sur la famille du futur, on soit immédiatement accusé d'être contre le mariage gay, voire d'être homophobe?

    Puisque principe de précaution il y a, appliquons-le. A défaut, je me sens en effet pris en otage : devoir tout accepter, en bloc et sans débat, ou tout refuser « à l’insu de mon plein gré ». A tout prendre, le refus est préférable, car tout en étant susceptible d’activer le principe de précaution il est évidemment réversible, alors que l’acceptation nous engage sans doute dans la voie irréfléchie de l’irréversibilité.

    Mais de là à joindre la foule dimanche ...

    Hervé Lainé

    « Lettre d'un père de famille de 60 ans ● Lettre à M. Delanoe pour la pelouse »

  • Commentaires

    1
    youenn75
    Jeudi 17 Janvier 2013 à 12:11

    Dans la liste des dérives imaginables, il faut penser aux chimères qui permettent de créer des êtres vivants à partir de deux ovules fécondés de parents différents, permettant ainsi dunir les patrimoines génétiques de personnes de même sexe

    2
    Palmog
    Dimanche 20 Janvier 2013 à 23:47

    Les chimères venant de deux ovules ou deux spermatozoïdes seraient possible en laboratoire et les embryons pourraient se développer. Cepandant cela aboutirait à des enfants avec des yndromes polymalformatifs et des retard mentaux. 

    Je m'explique; le chromosome 15 a une particularité : il porte dans son ADN une marque du gamète d'origine, à savoir masculin ou féminin.Si les deux chromosomes 15 de l'embryon ( issu chacun d'un gamète) viennent du même type de gamète, le développement ne peut pas se faire sormalement. Cela s'appelle le syndrome de Prader-Willi et Angelman (je ne sais plus lequel correspont à deux spermatozoïdes ou à deux ovules). 

    Je ne pense pas qu'on irai jusque là du coup; enfin en tout cas je l'espère car ce n'est pas du tout évident pour les parents...

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